Le problème du coût des soins dentaires
Depuis trente ans, la sécurité sociale se désengage des traitements dentaires, et transfère ses responsabilités en la matière sur les mutuelles et les assurances, tout en essayant de sauver la face en maintenant artificiellement bas le prix de certains actes.. les rares remboursés.
Par exemple, la base de remboursement de la couronne est aujourd’hui au même prix qu’en…1988.
Ce blocage d’une partie des tarifs des chirurgiens-dentistes les oblige à faire de la compensation, c’est à dire à faire payer trés cher certains actes pour rattraper ce qu’ils perdent par ailleurs .
PETIT RAPPEL HISTORIQUE :
Le remboursement des soins dentaires par la sécurité sociale ne date que de la fin des années 50.
A cette époque, des techniques rudimentaires et une approche farfelue de l’hygiène dans les cabinets permettaient de limiter le coût des soins dentaires.
C’était le temps des extractions au moindre problème, et des prothèses en plastique. Lorsque les techniques dentaires ont commencé à réellement évoluer, dans les années 80, leur coût a naturellement progressé avec leurs performances.
C’est alors que les responsables de la sécu ont décidé de ne plus rembourser les soins dentaires à leur juste valeur, tout en essayant de sauver la face en imposant des tarifs en dessous de leur prix de revient pour les quelques soins remboursés, et en libérant les autres pour faire glisser progressivement les remboursements vers les complémentaires et surtout l’autofinancement par les assurés.
Ainsi, progressivement le prix des couronnes et des autres prothèses a atteint des sommets, pour compenser les tarifs bloqués à un niveau scandaleusement bas , en dessous de leur prix de revient, des soins indispensables à la réalisation de ces prothèses.
LA SITUATION AUJOURD’HUI :
Cette politique vicieuse de « non remboursement tout en prétendant rembourser » nous a conduit à la situation suivante :
– Par son refus de s’intéresser au domaine dentaire, la sécu rembourse aujourd’hui les mêmes actes, dénommés de la même façon dans une nomenclature obsolète, que dans les années soixante. Ce qui la conduit à reconnaître une petite soixantaine d’actes pratiqués par les chirurgiens dentistes sur les… six cent vingt huit que ceux-ci sont capables de réaliser. D’où l’augmentation des cas où le praticien doit facturer des actes HN (hors nomenclature) car trop pointus ou trop récents pour la sécu.
– Plus grave encore, les mutuelles et autres assurances complémentaires, organismes privés à but hautement lucratif, se sont engouffrés dans la brèche de la manière la plus tordue qui soit : utilisant le domaine dentaire comme produit d’appel pour attirer des pig..pardon des clients, ceux-ci promettent des merveilles de remboursement, en se basant exclusivement sur la nomenclature de la sécu, laquelle, rappelons le encore une fois, est obsolète depuis quarante ans. C’est ainsi que l’on voit arriver dans nos cabinets des patients qui nous disent qu’ils sont décidés à se faire soigner la bouche parce qu’ils ont pris une mutuelle, ou une surmutuelle leur promettant monts et merveilles, mais qui ne reconnaît ni les implants, ni les soins de prévention, ni les soins des gencives, ni…etc, patients qui ne seront donc pas remboursés d’une grande partie de leurs traitements.
Dans de nombreux cas, il est plus rentable de laisser tomber la mutuelle, en ne gardant que les garanties d’hospitalisation, et de faire un emprunt pour ses dents.
LE COÛT DES SOINS DENTAIRES
Se faire soigner les dents coûte cher, nombreux sont ceux d’entre vous qui l’ont remarqué.
Mais lorsque vous réglez des soins dentaires, vous ne faites pas qu’honorer votre praticien.
Vous payez aussi les frais de fonctionnement du cabinet, les frais de personnel, le prothésiste, le comptable, la TVA sur tous les produits et les matériels, un plateau technique parmi les plus chers des professionnels de santé, etc…
Lorsque par exemple vous vous faites faire une couronne, pas moins de six personnes auront travaillé pour vous : le dentiste, bien sûr, son ou ses assistantes, le prothésiste, mais aussi la femme de ménage, le coursier, la comptable, et nous ne comptons pas les accessoires et les métiers annexes.
Tout cela, même réalisé pour partie en Asie, ou en totalité en Europe de l’Est, ne peut pas être bon marché !
LES SOLUTIONS
Toutefois, il faut se garder de jeter le bébé avec l’eau du bain.
En effet, la sécu rembourse dans notre pays des quantités de pathologies lourdes qui ne sont tout simplement pas traitées ailleurs, disons ailleurs que dans l’Europe des neuf.
Tous ceux qui ont voyagé en Afrique subsaharienne, bien sûr, mais aussi en Asie et aux USA ont pu constater l’état sanitaire déplorable des populations les moins aisées…ce qui peut commencer très tôt pour certaines pathologies lourdes et coûteuses, voire simplement pour des prothèses des membres ou oculaires.
Rappelons qu’une intervention de type greffe cœur-poumons coûte à la collectivité 150 000 € pour les quinze jours d’hospitalisation, auxquels s’ajoutent les périodes de récupération en maison de repos et les inévitables pensions d’invalidité.
Et dans notre pays TOUT LE MONDE y a accès, sans distinction de classe ou d’origine. La sécu est donc une bonne chose, peut-être demanderait-elle une gestion plus rigoureuse, mais cela est une autre histoire !
Comme nous venons de le voir, donc, la sécu ne peut tout rembourser, ce qui est quelque part assez inévitable.
Dans le domaine dentaire, la solution réaliste, sans doute celle de l’avenir, serait de définir un panier de soins remboursables, sur la base de leur importance pour les patients, et laisser le reste en honoraires libres déterminés, selon la formule consacrée, avec tact et mesure.
Mais gageons que dans le foutoir ambiant, on continue encore longtemps à faire de la compensation.
Enfin, rappelons à ceux, nombreux, qui confondent chiffre d’affaires et bénéfice, et qui seraient tentés de limiter le coût des soins dentaires en réduisant la rémunération des praticiens, que, une fois tout payé il ne reste au dentiste que 20% de ce qu’il encaisse. Réduire de moitié sa rémunération réduirait de seulement 10% le coût des soins dentaires…A la condition qu’il reste des dentistes disposés à exercer ce métier difficile, stressant et usant pour si peu !
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